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Allocution de Carine Picard-Nilès, 81e anniversaire des exécutions du 22/10/1941
<< Retour liste des actualitésAllocution de Carine Picard-Nilès, Présidente de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé-Aincourt
Carrière des fusillés, Châteaubriant, dimanche 23 octobre 2022
(Seul le prononcé fait foi)
Madame La Secrétaire d’État auprès du ministre des Armées et du ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, chargée de la Jeunesse et du Service National Universel,
Monsieur Le Préfet,
Monsieur le directeur de Office national des anciens combattants et victimes de guerre
Monsieur le Député,
Monsieur le Sénateur,
Monsieur le Maire,
Chère Catherine Ciron, 1re adjointe,
Mesdames, Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs les porte-drapeaux,
Mesdames et Messieurs les Présidents d’associations
Chères familles de fusillés, d’internés et déportés
Chère Colette Granet et Denise Bailly-Michels,
Cher Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT,
Chers Léon Deffontaines et Léna Raud pour le Mouvement des Jeunes Communistes de France, Cher Fabien Gay, Directeur du journal l’Humanité,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis, chers camarades,
Vous, la Jeunesse venue de toute la France,
À Nantes, à la Blisiere, ce matin, pas très loin d’ici.
En ce moment même à Souges, près de Bordeaux et au Mont-Valérien.
À chaque fois nous nous retrouvons, nous, démocrates.
Unis dans la fidélité du souvenir de ceux qui ont fait le sacrifice de leur vie pour l’indépendance et la liberté de la France.
Unis pour faire vivre la mémoire de ces hommes.
Toutes ces femmes et tous ces hommes de cœur et de bonne volonté, grands humanistes, communistes, gaullistes, socialistes, Justes ou citoyens, méritent que leur histoire soit connue, étudiée par les jeunes générations.
C’est pour nous, passeurs de mémoire, et j’en profite pour remercier tous mes amis qui, bénévolement, sont dans l’ombre mais sans qui rien de ce que vous voyez ne serait possible.
Bravo à eux ! Je vous demande de les applaudir.
C’est pour nous, passeurs de mémoire, un combat du quotidien que de faire vivre la mémoire de ces héros immortels, malgré eux. Oui, ils sont immortels. Guy Môquet aura toujours 17 ans quand ma grand-mère aura 100 ans dans 2 mois.
Ils ne sont pas que des noms de rues, de stades ou d’écoles.
Ils ne sont pas que des noms dans des livres ou des films.
Ils ne sont pas que des visages en noir et blanc.
N’oublions pas qu’ils étaient avant tout des êtres de chair et de sang, aimant la vie et le bonheur, aspirant à̀ combattre pour la justice et la dignité humaine, non à mourir en martyrs.
Il faut mesurer leur courage impressionnant face à la barbarie, jusqu’au sacrifice suprême.
Il y a 81 ans, ici, dans cette carrière tombèrent 27 hommes, militants du Parti Communiste Français, responsables syndicalistes CGT, instituteurs, ouvriers, docteurs ou étudiants. Puis 16 à Nantes et 5 au Mont-Valérien. 48 otages, une politique codifiée. Une politique visant, en priorité, les ennemis idéologiques du nazisme : les communistes, les Juifs, tziganes ou tout indésirables. De l’été 1941 à l’automne 1942, la « politique des otages » est un des outils essentiels de la répression de l’Occupant.
Aragon écrivit en février 1942 Le Témoin des martyrs, un texte basé sur les lettres des internés, et on pouvait y lire : « Vous pouvez haïr le communisme, vous ne pouvez pas ne pas admirer ces hommes. »
Aujourd’hui, comme hier, on veut nous opposer les uns aux autres, nous isoler les uns des autres. « Le peuple ne peut être gouverné que par l’exploitation de la peur », disait Hitler.
Cette histoire, il nous faut la rappeler sans cesse car elle mène à des excès de pouvoir, à la misère, à une guerre. Voulons-nous cela pour nos enfants, nos jeunes, notre société, quand l’extrême droite monte partout dans le monde et que certains oublient que nous l’avons déjà essayée, cette droite, franquiste en Espagne, mussolinienne en Italie, hitlérienne en Allemagne, oserais-je dire « pétainiste » en France ?
Boris Taslitzky, le lendemain de l’exécution de Jean-Pierre Timbaud, en 41, lui a rendu hommage dans un dessin au fusain, le représentant debout, les mains liées dans le dos, la bouche ouverte, comme pour suggérer que sa voix ne s’éteindra pas. Ce même Boris Taslitzky qui s’exprima ainsi à son retour de Buchenwald : « Si je vais en enfer, j’y ferai des croquis. D’ailleurs, j’ai l’expérience, j’y suis allé et j’ai dessiné. »
La résistance ne doit pas tomber dans l’oubli, ni voir son histoire réécrite ; la reprise du sigle CNR est déplacée et réduit tout ce qui rappelle la lutte pour le progrès social et les conquis sociaux du Conseil National de la Résistance, et ce dans un contexte de guerre à nos portes.
Notre Amicale œuvre à la mémoire, à une mémoire concrète par le biais de notre projet pédagogique de collecte de terres de lieux d’internement, de déportation ou de résistance pour renouveler les alvéoles du monument d’Antoine Rohal, devant nous.
Nous sommes donc fiers d’accueillir, aujourd’hui, une centaine de jeunes de 8 établissements scolaires pour apporter leur collecte. D’ailleurs, nous sommes fiers d’accueillir de la terre de Rawa Ruska, en Ukraine, en partenariat avec l’association « ceux de Rawa Ruska et leurs descendants », que je salue.
Vous, les jeunes, merci de participer à votre niveau à ce que ces otages fusillés le 22 octobre 1941 restent à jamais gravés dans nos mémoires comme des héros face à l’oppression nazi antidémocratique et raciste.
Pour tout cela, plus que jamais nous avons besoin de vous tous, de votre investissement, de votre adhésion à l’Amicale, de votre souscription afin qu’ensemble nous relevions le défi de la modernité et qu’ensemble nous soyons les bâtisseurs des lendemains qui chantent, comme ils nous l’ont demandé, « soyons dignes d’eux » !
Je vous remercie.
Carine Picard-Nilès