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05/06/23 Les obsèques d’Odette Nilès

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publié le : 20/06/2023

Les adieux à une grande dame

Le lundi 5 juin 2023, en début d’après-midi ont eu lieu les obsèques de notre présidente d’honneur, Odette Nilès, née Lecland, dernière survivante du camp de Choisel.

À 14h00, les porte-drapeaux, les membres de la famille et représentants de l’Amicale ont accompagné la célèbre résistante vers sa dernière demeure, dans le cimetière de Drancy, où repose son défunt mari Maurice Nilès depuis 2001. Devant la concession familiale, les premières notes de La Montagne, de Jean Ferrat, ont retenti.

Quelques jours auparavant, le lendemain-même de sa mort dans la nuit du 26 au 27 mai (journée nationale de la Résistance), des représentants politiques et syndicaux lui rendaient l’hommage qu’elle mérite. Le président de la République se fendait d’un twit honorant la mémoire de cette « combattante inlassable ».

Au nom du PC, Ian Brossat rend hommage à Odette. Elle figurait sur sa liste pour les dernières élections européennes. (c) Photo S. Rogé

À Drancy, beaucoup sont venus saluer une dernière fois cette figure de la ville, militante communiste, passeuse de mémoire. Pour celles et ceux qui l’ont bien connue, l’émotion est vive, la larme très proche, au coin des yeux, surtout quand son arrière-petit-fils Xavier se met à entonner deux des chansons préférées de son illustre aïeule : « Au devant de la vie« , chanson du Front Populaire de 1936, et « La Quête« , de Jacques Brel.

Parmi les prises de parole, au nom de l’Amicale Joël Busson salue son amie en ces termes :

« Odette heureusement n’a pas cessé, tant que ses forces le lui permirent, de témoigner. Je le dois à mes camarades, disait-elle. Cette mémoire, si importante pour l’avenir de la démocratie, Odette, nous en faisons le serment, nous la ferons vivre avec l’Amicale et ses comités, et tous ceux qui luttent contre l’oubli, les négationnistes et falsificateurs, l’extrême-droite. À Châteaubriant, nous construirons le nouveau musée pour mieux transmettre la mémoire de cette page de l’Histoire de France et de la Résistance populaire que tu voulais. (…) Odette, tu demeuras l’un des symboles de l’engagement d’une jeunesse de France à l’avant-garde de la Résistance. Merci pour tes enseignements, pour l’héritage si riche que tu nous lègues. Tu nous manques beaucoup, mais ton souvenir vivra dans nos coeurs et, nous l’espérons, aussi sur beaucoup de plaques de rue, de squares, d’écoles, de lieux publics, tant ta vie est un exemple de courage et d’abnégation. »

Hommage aux drapeaux. (c) Photo S. Rogé

Claude Nilès, ses enfants, Carine en tête, qui a repris les rênes de l’Amicale, accompagnée de son mari Michel et de leur autre fils Fabien, mais aussi son frère Franck et la famille de ce dernier ont témoigné de leur amour, devant deux portraits d’Odette à deux époques. Emouvant hommage, qui nous dévoile un peu plus une autre facette, celle de la maman et de la mamie attentionnée et inspiratrice…

Fabien déclare : « Cet altruisme et cette camaraderie qu’elle a développée aux côtés de ses frangines, elle nous les a transmis comme valeurs. Petits, elle nous donnait des bonbons que l’on devait partager. (…) Aujourd’hui adulte, elle continue de me faire grandir. (…) Ses engagements pour la mémoire ou ses valeurs communistes me font réfléchir à cette société qui est la nôtre. En ces temps de crise sociale et environnementale, j’ai peur. Peur que ce pour quoi elle s’est battue se perde. Peur d’avancer. Mais quoi qu’il en soit, s’il y a bien un enseignement que j’ai retenu d’elle, c’est qu’il ne faut pas perdre espoir et qu’il faut rester soudés. Parce que, ensemble, on peut tout faire. On peut lutter. Alors j’avance, un pas vers l’autre. »

Et Carine évoque ce souvenir : « Comme j’aime à le dire, elle était la femme de ma vie, celle qui venait me rejoindre à la fac à Paris et avec qui j’allais manger dans un petit resto rue Mouffetard avant d’aller faire un tour aux galeries Lafayette. Oh, à l’époque, ce n’était pas pour acheter, car à la maison, c’étaient tous des ouvriers, fils et filles d’ouvriers ou de coiffeurs, pour lesquels la valeur de l’argent a un sens. C’était plus parce qu’il y avait un sentiment de liberté, de découvrir le beau, de visiter des lieux auxquels elle n’avait pas pu accéder jeune. C’était un peu comme dans la Boum, ce film que nous sommes allées voir, toutes les deux, à l’Aviatic au Bourget. C’est aussi à cette époque qu’elle m’a parlé de Guy Môquet, de sa lettre et de la bague qu’il lui avait offerte, fabriquée dans une pièce de monnaie au camp. L’amour, pour elle, c’était important, à ne pas prendre à la légère. C’était son petit côté vieux jeu. »

Moment solennel, les première notes de la Marseillaise chantée par Xavier puis reprise en choeur par les participants. Cette Marseillaise qu’Odette ne pouvait plus écouter sans en avoir le coeur déchiré, depuis qu’elle et ses camarades de détention l’avaient hurlée à la face de leurs geôliers pour accompagner le départ des otages vers la mort, depuis le camp de Choisel.

Une page se tourne. Mais la flamme de la Résistance, quoi qu’il en coûte, continuera de brûler…

 

N. Bonnefoix – citations des discours de Joël Busson, Fabien et Carine Picard-Nilès

 

 

 

Téléchargez les textes complets des discours en cliquant sur les liens ci-dessous :

Discours Mamie FABIEN Hommage à Odette_ Busson Mamie Carine Franck et Fabien